Témoignage malade bipolaire type 2, pour les malades, proches et aidants parce que partager c'est déjà mieux comprendre :
" Bonjour, je m’appelle Céline, je suis bipolaire type 2. Je me soigne avec des médicaments et des conseils d’hygiène de vie que j’applique au mieux. Aujourd’hui, je suis équilibrée après quinze ans de galère ponctués par dix dépressions sévères, deux phases hypomaniaques, un virage maniaque et une phase maniaque.
Ici, je ne raconterai pas mes crises car
mon histoire est, de ce point de vue, similaire à d’autres témoignages que vous trouverez par ailleurs.
Avec ce témoignage, je voudrais, plutôt, m’adresser aux malades mais aussi aux proches de malades bipolaires. Je voudrais vous dire quels ont été les effets destructeurs de la maladie ; comment nous avons pu y faire face et comment , encore aujourd’hui, nous y faisons face.
Ce que je vais vous dire ne porte aucun jugement mais raconte simplement mon point de vue.
———————————
La maladie bipolaire est extrêmement destructrice pour nous, malades, mais aussi pour nos relations sociales:
Avec nos amis, cela été pour certains, l’incompréhension et la colère. De très bons amis ne se sont pas révélés les plus écoutants, ni les plus bienveillants. Cela m’a fait mal. Aujourd’hui, peu sont encore nos amis.
Avec ma famille avec laquelle je m’entends très bien, en temps normal, cela a été aussi très difficile.
Maman n’a rien compris pour elle consulter un psychiatre était impensable.
Mes frères ont eu des réactions différentes. L’un m’a soutenue et a soutenu mon mari. L’autre n’a rien dit alors que nous étions proche petits.
Mes enfants, lors de mes crises de troubles de l’humeur, ont été protégés par mon mari. Ils voyaient leur maman dans un état différent de d’habitude mais disaient « maman est malade, elle est soignée, cela ira mieux ». Et comme je je remontais la pente après chaque dépression et que je retrouvais mon état normal, ils étaient rassurés.
Mon mari ne me reconnaissait pas, il était désarmé et ne savait que faire. Je crois qu’il s’est raccroché à l’image qu’il avait de moi avant ma première crise et à mon état normal entre les crises.
Lors de mes dépressions, il ne comprenait pas pourquoi la femme qu’il aimait était dépressive, avait des idées très noires et était si terrorisée au fond de son lit. Il voulait vraiment m’aider mais ne sait pas comment s’y prendre face à mes dépressions sévères inexpliquées. Il a essayé d’être patient. Il m’a poussée à aller consulter ; il m’a accompagnée chez le médecin autant que possible car il a un travail très prenant. Il m’a fait hospitalisée, avec mon accord, lorsqu’il y en avait besoin. Sa présence a été indispensable pour moi.
Lors de mes phases hautes, il a été complètement désorienté, déstabilisé devant mes attitudes impossibles à raisonner. Il était perdu, meurtri et ne comprenait pas ce qui se passait.
Les deux premières phases ont été hypomaniaques et de courtes durée donc il n’y a pas trop de conséquences.
La troisième phase haute a été un virage maniaque qui m’a fait monté en phase maniaque. Cette phase maniaque a été catastrophique pour notre couple, notre confiance mutuelle et a ébranlé notre amour.
Lors de cette montée en manie, j’ai fait toutes les conneries qu’un malade peut faire lors de ces crises maniaques. Ce que j’ai fait à laisser beaucoup de traces et de cicatrices. Il est très difficile pour mon mari et moi-même de comprendre, d’accepter, d’oublier et peut-être de pardonner.
Ce virage maniaque a aboutit à une hospitalisation et là, le diagnostic de troubles de l’humeur ou bipolarité est tombé ! Ouf !
Alors, tout mon entourage et moi-même ont pu mettre des mots sur les maux.
Alors, la réalisation que les crises de changements d’humeur et leurs conséquences étaient dues à une maladie a été salvatrice.
Alors, la compréhension a pu s’installer et le dialogue se renouer. Mon mari, mes enfants, quelques proches se sont informés et ont compris. Aujourd’hui ils me soutiennent et m’aident à faire face à ma maladie.
Alors, un traitement médicamenteux avec des thymorégulateurs a été mis en place et est, aujourd’hui, bien suivi par moi-même et par le psychiatre.
J’ai pu suivre des séances de psycho-éducation animées par un médecin du CHU. Elles m’ont permises de mieux accepter et de mieux comprendre ma maladie. Des séances étaient aussi organisées pour les proches, mon mari y a participé. Cela lui a permis de réaliser l’impact de la maladie sur d’autres proches.
Par ailleurs, je fais, régulièrement, des séances psychothérapie de type T.C.C.( Thérapie Cognitivo Comportementale). Elles m’aident, notamment, à mieux gérer l’ampleur de mes émotions. Je tiens un agenda de l’humeur, outil indispensable au suivi de mes variations de l’humeur et de leur effets (sommeil, activités physiques, plaisirs, contrariétés, régularité des repas, etc…).
——
Aujourd’hui, je suis équilibrée. Je suis comme un funambule sur son fil avec un balancier renforcé et un filet représenté par mon entourage, le médecin et la psychologue.
J’espère que ce témoignage pourra aider les malades ayant des troubles de l’humeur appelés bipolarité.
J’espère que ce témoignage pourra aider les proches et les aidants. Car pour moi arriver à l’équilibre nécessite un travail d’équipe entre les malades, leur entourage, les médecins et les psychologues.
Que la vie est belle pour tous lorsque la maladie bipolaire qui est en moi est devenue calme !
Le chemin vers la stabilisation des troubles de l’humeur bipolaires est long mais qu’il vaut la peine être vécu.