Témoignage d'une personne soufrant de trouble bipolaire ayant trouvé l'équilibre

 Témoignage d'une personne soufrant de trouble bipolaire ayant trouvé l'équilibre


" Bonjour je me présente ...

Je m’appelle M. Je suis une femme de 40 ans, célibataire sans enfant. Je suis cadre paramédical laborantine dans un hôpital d’Alger ville où je réside.
Je suis bipolaire type 1. Ou plutôt, je suis une femme active et bien dans sa vie porteuse de la maladie bipolaire type I. Car ma maladie c’est une partie de moi mais ce n’est pas moi.
Diagnostiquée en 2003 et stabilisée depuis 2011. 12 ans de stabilité, déjà! J'ai certes vécu beaucoup de mauvaises expériences à cause du trouble bipolaire mais aujourd’hui je mène une vie tranquille, une vie que j'aime; une belle vie épanouie et riche.

La bascule vers « le mieux » est arrivée lorsque j’ai enfin accepté ma maladie, accepté de vivre avec elle mais pas pour elle. Lorsque j’ai accepté de ne pas arrêter la médication.
Lorsque j’ai intégré l’extrême importance de l'hygiène de vie. Ce « mieux », c’est une maîtrise de la maladie et une stabilité qui dure depuis 12 ans maintenant. Et ceci grâce, entre
autres, aux conseils avisés de mon psychologue et mon psychiatre.

Avant l’année 2011 j'ai vécu beaucoup de phases hautes/maniaques et basses/dépressives.
Avec beaucoup plus de hauts que de bas. J’ai vécu 3 hospitalisations en psychiatrie et deux
tentatives de suicide. J’étais alors tout simplement dans le déni. Je n’avais pas accepté mamaladie. A chaque mieux très temporaire j’arrêtais le traitement subitement et je me retrouvais immanquablement en phase maniaque ou dépressive.
Je me disais que j’étais une personne « normale », que je perdais mon temps en consultation
psychiatrique, que les médicaments ne servaient à rien ...

Jusqu’au jour de 2011 où je me suis retrouvé en phase maniaque. J’ai alors décidé volontairement et donc sans contrainte de me faire hospitaliser ; J’étais épuisée et j'avais besoin d'un repos physique et moral. et le seule lieu pour ca c'etait l'hopital psychiatrique.
Je me suis alors promis à moi-même que ce serait la dernière hospitalisation. Car j'avais pris enfin la décision que ce serait la dernière fois. Que j’en avais marre de cette vie, de cette
survie en fait, en dent de scie. Que j’allais combattre ma maladie de cette façon. Et j'ai réussi, dieu merci, mais ça m’a demandé beaucoup de travail sur moi. Beaucoup !

J'ai commencé à faire beaucoup de recherche sur le trouble bipolaire pour en apprendre un maximum, j’ai adhéré à l'association france depression.
J'ai aussi trouvé le soutien familiale, amicale, professionnel et social; pour moi le trouble bipolaire n'a jamais été un handicap ou même un obstacle pour réussi ma vie professionnel et ma vie privée. J'ai pu tenir mon poste de travail depuis l’année 2006. J'occupe un poste de responsabilité : je suis cadre paramédicale chef d’une équipe spécialisée en biochimie. Pour
moi le travail fait partie de ma thérapie. J'aime beaucoup mon travail pour lequel j’estime être très compétente.

Et j'ai des chefs et des collègues très compréhensifs; Ils sont fiers de moi car j'ai déclaré sans honte que je suis bipolaire. J'ai prouvé à tout le monde que je suis capable de tenir mon poste.
J'ai même réussi à obtenir une bourse d’étude à liège en Belgique. Dans un hôpital.
J’ai de très bons amis qui me soutiennent vraiment. J'ai eu aussi la chance de trouver le
soutien familiale; Je pense que c’est très important pour une personne bipolaire.
Je me suis bien intégré dans la société et j'ai réalisé beaucoup de projets dans ma vie. Et j’écoute les conseils de mon psychologue et mon psychiatre.
Mon psychologue m’a conseillé de me donner des objectifs réalistes et réalisables. A chaque fois que je réalise un objectif je passe au suivant et ça marche !!! J’ai réussi à avoir un projet d'un beau logement, une voiture,j'ai tenté ma chance a dubai aussi.
J'ai voyagé un peu partout dans le monde car les voyages font aussi partie de ma thérapie.
J’écoute de la musique aussi car la musique fait partie de la thérapie psychiatrique. Et comme je suis musulmane pratiquante, lire le Coran et faire les prières à certains moments de la journée font partie aussi de ma thérapie. Aujourd’hui je participe à des groupes de parole en ligne en Suisse, Belgique et France. Ça me fait beaucoup de bien. C'est si important d’échanger avec des personnes, des « pairs », qui me comprennent sans préjugé, sans
stigmatisation.

Je sais que le trouble bipolaire est une maladie chronique, au long cours, mais c'est à nous bipolaires de choisir ; Ou bien on reste dans le cercle vicieux des épisodes, on n’accepte pas ce qu’on est et on stagne dans le déni. Avec le risque élevé de ne jamais s'en sortir. Ou bien
on accepte de vivre avec son trouble et de rester « au milieu », dans une euthymie transformée par le travail sur soi en une stabilité au long cours. Un changement total de paradigme tel que
décrit dans l’initiative Bipolarité Stable .
Cette stabilisation où l’on peut enfin vivre une vie normale, réaliser nos projets et nos rêves jusqu’au bout; Ce qui n’est pas le cas dans les épisodes hauts où on entreprend tout et on ne finit presque rien. Ou dans les épisodes dépressifs bas ou on abandonne d’emblée presque tout.
J’ai une grande confiance en moi et une foi qui me porte. « Yes I can », oui je peux (et je veux). Je suis fière d’être bipolaire car pas mal de célébrités mondiales étaient ou sont
bipolaires : Politiciens, artistes, scientifiques et bien d'autres.

J'ai eu une proposition de participation à un podcast avec une journaliste libanaise pour briser le tabou et la stigmatisation de la maladie psychiatrique dans le monde arabe. Car ici on traite encore assez mal cette maladie bipolaire ainsi que d’ailleurs n'importe quelle autre maladie
psychiatrique. C’est considéré comme une maladie honteuse et ça s’accompagne de beaucoup
de stigmatisation dans la sphère sociale, professionnelle et familiale. Je veux vraiment briser
le tabou en Algérie et dans le monde arabe. inchallah; Toute chose a un côté positif et un côté négatif. Moi je profite du coté positif de ma maladie et j'avance.

J’arrive à la fin de mon témoignage. Je veux transmettre un message d’espoir pour toutes les personnes atteintes de trouble bipolaire et qui souffrent en restant cantonnées dans le cercle
infernal des hauts et des bas: Très cher « pair » bipolaire, accepte ta maladie et vis avec. VIS.

Soit fière de toi, n’ai pas honte. Car c'est une maladie comme toutes les autres maladies et personne n'est à l'abri d’en souffrir. Tu es unique et créatif et tu vas t'en sortir. Il faut juste avoir une grande confiance en toi et une forte foi et tu y arriveras un jour.

Argos 2001 Doubs Franche-Comté

E-café Sam. 27 mai 2023 10h-12h